« Il faut arriver à faire France au 21ème siècle »
29 Mar 2018
Jean-Pierre Chevènement était l’invité du « 19h Ruth Elkrief » sur BFM TV
mercredi 28 mars 2018
Jean-Pierre Chevènement répondait aux questions de Ruth Elkrief:
- Marche blanche et antisémitisme
[A propos de l’éviction de Jean-Luc Mélenchon et de Marine Le Pen de la Marche blanche]
Tous nos concitoyens sont soulevés d’indignation devant le crime atroce qui a été commis contre Mireille Knoll. J’ai admiré les propos de son fils.
[sur les actes antisémites qui feraient l’objet de déni ou de silence]
J’ai été ministre de l’Intérieur, je ne crois pas que ceux qui se souviennent de mon passage à ce ministère aient pu associer mon nom à une quelconque indifférence vis-à-vis de ces actes, rares à l’époque, que j’ai toujours flétris et combattus. Cela fait partie d’une culture du déni qui n’a jamais été la mienne. Il y a des faits qu’il faut savoir regarder en face mais qu ‘il ne faut pas instrumenter à des fins d’hystérisation du débat public. - Il y a d’un côté la religion, de l’autre côté la politique, il faut distinguer les deux domaines.
- La Fondation de l’Islam de France est laïque, à vocation profane. Nous cherchons à apporter des réponses culturelles à la hauteur du défi que nous jette l’islamisme radical.
- Le Président de la République a prononcé un discours plein d’élévation. Il a fait appel aux forces morales qui sont notre vraie capacité de riposte au terrorisme islamiste. C’est la résilience du peuple français, sa capacité à se rassembler, se souder, qui fera qu’à la fin nous pourrons l’emporter sur le terrorisme djihadiste, phénomène qui durera longtemps malheureusement car les causes endogènes et exogènes sont là.
- Les événements qui ont eu lieu durant la Marche blanche n’étaient pas à la hauteur de cette journée qui était un hommage solennel à un colonel qui, par son comportement, a relevé l’idée qu’on pouvait se faire de la France et des Français. Le Président de la République a appelé à un rassemblement national.
- J’entends proposer d’expulser les fichés S. Il n’y a pas d’autorité judiciaire qui puisse, sur la base de soupçons, prononcer une telle expulsion dans l’état actuel du droit. Ou alors il faut instaurer une nouvelle « loi des suspects »…
- J’ai entendu un de mes amis, Manuel Valls, prôner l’interdiction du Salafisme. Je suis tout prêt à combattre cette idéologie mortifère, de fous furieux, qui se déguise sous les atours de la religion mais qui aboutit à des crimes abominables. Il faut mener le combat d’idée, mais on ne peut pas interdire une croyance. C’est ce que nous pouvons faire à travers la Fondation de l’Islam de France, qui vise à l’élévation morale, spirituelle, intellectuelle : c’est la vraie réponse dans la durée.
- Cette petite minorité fanatique qui se recrute dans le vivier des délinquants multirécidivistes, nous en viendrons à bout.
- Nous avons là un chaudron de ressentiment, de haine recuite et de rancœur . Il y a des causes historiques, notamment dans les rapports de l’Orient et de l’Occident. Il y a eu la colonisation et aussi des interventions tout à fait déplacées, mais la véritable cause est endogène.
- Le Salafisme, c’est-à-dire le Wahhabisme, existait déjà au 18ème siècle. Après la chute du Califat ottoman en 1924, en 1928 se créent les Frères musulmans. L’Islamisme et sa violence sont venus en Europe avec le désordre créé au Moyen Orient : l’invasion américaine de l’Irak et la destruction de l’Etat irakien ont abouti à une guerre civile et à une répression des Sunnites par le gouvernement de Bagdad, qui les a jetés dans les bras d’Al-Qaïda puis de Daech.
- Beaucoup de nos concitoyens ont envie de faire vivre l’exemple du colonel Beltrame et de le proposer au pays tout entier pour que la réponse au défi du terrorisme djihadiste soit la bonne réponse. Une réponse morale, sociale, civique : une réponse française.
- L’avenir de ces jeunes hors-sol parmi lesquels se recrutent les djihadistes est en France. Il faut leur faire aimer la France, il faut en faire des Français. Le problème est sans solution si la France ne veut pas intégrer et si certains ne veulent pas s’intégrer. Il faut arriver à faire France au 21ème siècle. C’est le rôle que, pour ma modeste part, je me donne à travers la Fondation de l’Islam de France.