« La conférence internationale de Paris pour la paix et la solidarité » se conclut par la signature d’un mémorandum de lutte contre l’extrémisme et le terrorisme religieux
Croyances & Villes, 18 septembre 2019. Par Olivier Konarzewski
Pari gagné pour Ghaleb Bencheikh. Au terme quelque peu mouvementé de la « Conférence internationale de Paris pour la paix et la solidarité », co-organisée par la Ligue islamique mondiale et la Fondation de l’Islam de France, qu’il préside, un mémorandum engageant les organisations religieuses à « lutter contre l’extrémisme et le terrorisme et tout faire pour dirimer leur thèse et contester leurs assertions » a été signé dans la soirée du 17 septembre, au Palais Brongniart à Paris.
Il faut le reconnaître, la tenue de cette conférence précédée de nombreuses polémiques et émaillée, en son début, de manifestations liées à la venue de Mohammed Al-Issa, Secrétaire Général de la Ligue islamique mondiale (LIM) a finalement tenu sa promesse. Celle que Ghaleb Bencheikh avait annoncé dans son allocution d’ouverture en ces termes : « de ce jour et de ce lieu, du palais Brongniart, à Paris s’ouvre une nouvelle ère dont la date doit être fixée pour notre monde contemporain ». On peut le penser au moins pour deux motifs.
Premier motif, Mohammed Al-Issa, n’a-t-il pas affirmé ce mardi 17 septembre, à Paris, en public au milieu de dignitaires religieux juifs, chrétiens et musulmans, que « l’islam politique » représentait « une menace », assurant que son organisation avait « adopté une vision nouvelle pour faire face au fanatisme », ajoutant soutenir totalement « le contenu du discours du président français M. Macron en avril dernier quand il a parlé de l’islam politique qui représente une menace et une source de division dans la société » ?
Si tel est le cas, c’est à dire si la traduction de son propos de l’arabe au français était parfaitement exacte, cette déclaration, ce moment, est à marquer d’une pierre blanche. En tout cas si l’en croit la suite de son propos dans lequel il a insisté sur l’importance pour les musulmans de France de respecter la constitution de leur pays, ses lois, sa culture en déclarant que « Tous les musulmans en Europe devraient respecter les constitutions, les lois et les cultures des pays où ils vivent » et, a-t-il ajouté, « ils ne devraient pas accepter l’importation de fatwas et des idées étrangères », elle pourrait être la pierre de touche d’une nouvelle vision mondiale de (et pour) l’islam .
Second motif, c’est évidemment la signature hier soir, du « mémorandum d’entente et d’amitié entre les trois religions monothéistes, dont il avait également assuré lors de son discours d’ouverture que « les clauses nous feront encore entrer dans l’Histoire pour certaines annonces ».
Ce texte qui engage les représentants français des cultes, Haïm Korsia, Grand Rabbin de France, François Clavairoly, co-président du Conseil d’Eglises chrétiennes et président de la fédération protestante de France (on notera au passage l’absence du CFCM), Mohammed Al-Issa, Secrétaire général de la Ligue islamique mondiale, entend « lutter contre l’extrémisme et le terrorisme et tout faire pour dirimer leur thèse et contester leurs assertions » mais aussi « promouvoir la liberté de conscience et la liberté religieuse ». Le mémorandum affirme ainsi qu’il « n’y a pas à choisir entre être citoyen et être croyant : on est citoyen et croyant » et oppose « une culture de la fraternité » contre « l’oppression et la haine ».
Parmi les annonces qui devraient faire entrer le mémorandum dans l’histoire, il y a la visite du Secrétaire général de la Ligue Islamique Mondiale, Mohamed Al-Issa à Auschwitz. Programmée au premier trimestre 2020 à l’occasion du 75e anniversaire de la libération des camps de la mort nazis, cette visite en compagnie du Grand Rabbinat de France, en l’occurrence Haïm Korsia, et du Conseil des Églises chrétiennes sera une première mondiale.
Alors si l’on ne peut pas ignorer et ne pas condamner les persécutions du wahhabisme saoudien symbolisées par la manifestation d’Ensaf Haidar demandant la libération de son mari Raif Badawi devant le Palais Brongniart, il faut aussi saluer le courage de Ghaleb Bencheikh d’avoir osé saisir l’occasion, si polémique et si ténue soit-elle, de la déclaration de La Ligue Islamique Mondiale qui dit avoir « adopté une vision nouvelle pour faire face au fanatisme, à la violence, au terrorisme », occasion saisie pour donner une chance à la paix dans le monde. Par cette manifestation, avec ce mémorandum, il s’en est rendu publiquement comptable devant la société française et ce n’est pas rien. Sur ce chantier de la paix et des valeurs de liberté, d’égalité et de fraternité, aucun volontaire n’est de trop, pas même les religions.
Source : Croyances & Villes