Ghaleb Bencheikh appelle à ce que l’islam « soit une cause nationale »

Fig7

Ghaleb Bencheikh était l’invité du Talk – Le Figaro animé par Yves Thréard, le mardi 10 décembre 2019.

Successeur de Jean-Pierre Chevènement, il appelle à ce que l’islam « soit une cause nationale » pour l’ensemble des citoyens.

« Contrecarrer l’idéologie salafiste, le communautarisme et le séparatisme ; affirmer le primat des principes et valeurs républicains ; s’affranchir de l’ingérence d’Etats étrangers : agir au service de l’intérêt général, de la France ».

 

 

«L’islam est un sujet crucial dans notre pays!», a fait valoir Ghaleb Bencheikh, mardi, au «Talk Le Figaro»,appelant à ce que l’islam soit «une cause nationale». Le Conseil français du culte musulman (CFCM), qui devait tenir ses élections samedi dernier, a une nouvelle fois reporté le scrutin à janvier en raison du climat social. Créé en 2003 par Nicolas Sarkozy, pour représenter l’ensemble des musulmans de France, le CFCM est à la peine et critiqué.

En tant que président de la Fondation de l’islam de France (FIF), une institution laïque ayant une mission éducative, culturelle et sociale, Bencheikh a pour principe de respecter le «Yalta»qui existe entre le cultuel et le culturel, mais s’autorise cette fois une transgression, tant le CFCM regorge pour lui de paradoxes: «Il est curieux que Nicolas Sarkozy se mêle, à un moment donné, de ce que la loi ne l’autorise pas à faire», rappelle Ghaleb Bencheikh, faisant écho à la loi de 1905. Il rappelle aussi que Nicolas Sarkozy avait lui-même désigné les membres du bureau du CFCM, «instance qui se voulait élective», souligne-t-il. «Nous ne pouvons pas demander à notre État de ne pas se mêler des cultes quels qu’ils soient, et nous accommoder de ce que j’appelle l’islam consulaire», poursuit-il, à savoir une présidence tournante du CFCM pour tantôt faire plaisir au Maroc tantôt à l’Algérie ou à la Turquie. «C’est inacceptable!», s’insurge l’islamologue. Autre paradoxe: il n’est pas possible, selon lui, de demander aux pouvoirs publics de ne pas se mêler des affaires cultuelles sans leur «fournir des hommes et des femmes sérieux, intègres, compétents, ayant la volonté d’agir pour le bien commun et l’intérêt général». Enfin, il donne raison à Mohammed Moussaoui, prétendant à la présidence du CFCM, qui pointe une défiance des musulmans vis-à-vis de l’institution elle-même, ajoutant, non sans ironie, que «les musulmans n’ont pas besoin d’être représentés par une quelconque instance».

En revanche, Bencheikh plaide pour une instance qui se charge de superviser les questions cultuelles: la gestion des mosquées, une vision de l’ensemble de la pratique du culte, la formation des imams. Si, sur le principe, ces missions relèvent de la compétence du CFCM, Bencheikh estime que ce n’est pas le cas en pratique.

Un islam de France est-il possible ou est-ce une chimère? Pour le théologien, qui croit «à l’autorité de la République», c’est tout à fait faisable dans le sens, dit-il, où «il y a un islam d’Indonésie, du Yémen, du Canada, etc.». S’adressant aux pouvoirs publics et aux musulmans, le patron de la FIF définit cet islam comme «gallican s’affranchissant de toute tutelle étrangère».

Sur la question du voile, Bencheikh est clair et souligne qu’il n’a pas à être qualifié «d’islamique». Il regrette «un retour à une sorte de pudibonderie après un apogée civilisationnel de raffinement, du bien-être de l’hédonisme, du plaisir et des relations harmonieuses entre hommes et femmes». Enfin, s’il n’emploie «en aucun cas et en aucune manière» le terme islamophobie, s’appuyant sur la loi de 1905, Bencheikh assure aussi «que la critique des religions est la bienvenue et salutaire».

Source : Le Figaro